Restent le coeur et le corps

[ALZHEIMER]

Le corps est là. L’esprit est occupé ailleurs, enfermé dans le passé, visiteur égaré du présent.

 

Je suis allée passer du temps auprès de personnes âgées atteintes de la maladie d’Alzheimer, au sein d’une unité spécialisée dans une maison de retraite. Je savais que les moments passés ensemble seraient, pour eux, vite oubliés. Pourtant, je me suis rarement sentie aussi utile. Utile pour écouter les ritournelles, pour accueillir les phrases jamais abouties, pour être le temps d’un rien leur lien au présent, pour moucher des nez humides, et accueillir le trop plein d’amour, de peur et de vide. Dans cet espace-temps, c’est la commémoration quotidienne d’un temps révolu. Des bribes du passé s’imposent au présent. Des souvenirs heureux, de temps en temps, refont surface.

 

Des traces douloureuses, régulièrement, ressurgissent. Des chagrins bruyants et impudiques cohabitent parfois avec le programme télévisé que tout le monde entend mais que personne n’écoute. C’est l’inquiétude qui, le plus souvent, tient compagnie. Ces fantômes réminiscents s’invitent à heure fixe. Malgré les décennies, ils n’ont pas pris une ride. Leurs hôtes impuissants vivent avec eux, comme ils peuvent.

 

La routine ici est dissonante. Absurde, rude et tendre.

Alzheimer, c’est un plongeon en apnée dans la vulnérabilité.

Bribes

Etre vieux

Réponses obtenus suite à un appel à participation à un questionnaire en réponse à la question : Etre vieille, être vieux, c'est quoi pour vous ? 

Bribes II